Mobilités actives et activité physique

La construction d’une nouvelle voie publique entraîne des réflexions sur l’aménagement de la voie et des espaces publics, les modes doux, l’accès aux équipements sportifs… Cette fiche présente en quoi l’aménagement urbain peut avoir une influence sur les mobilités actives et la pratique d’une activité physique et par quelles mesures les favoriser au sein d’un quartier.

Définitions, précisions

  • Mobilités actives : toute forme de déplacement effectué sans apport d’énergie autre qu’humaine et par le seul effort physique de la personne qui se déplace. Elle se réalise à l’aide de modes dits « actifs » (marche, vélo, trottinette, rollers, skateboard…).
  • Activité physique : tout mouvement corporel produit par les muscles squelettiques, responsable d’une augmentation de la dépense énergétique par rapport à la dépense énergétique de repos (Conférence ministérielle européenne de l’OMS sur la lutte contre l’obésité, Istanbul, 2006). L’activité physique peut être pratiquée en poursuivant des objectifs variés et dans différents contextes : loisirs, activités domestiques, travail…
  • Marchabilité de l’environnement (‘‘walkability’’) (1) : potentiel piétonnier d’un milieu donné, mesure de la capacité d’un milieu à faciliter les déplacements utilitaires à pied. Des indices de marchabilité1 ont été développés et intègrent en général cinq dimensions : densité résidentielle, diversité des activités, design urbain, accessibilité des équipements et multi-modalité. Des facteurs subjectifs peuvent également être pris en compte, comme la sécurité, le confort et le satisfaction piétonnière perçues par la population.

Recommandations nationales sur la pratique d’une activité physique :

  • Adultes (18-64 ans) : 30 minutes d’activité physique développant l’aptitude cardiorespiratoire, d’intensité modérée à élevée au moins 5 jours par semaine, en évitant de rester 2 jours consécutifs sans pratique ;
  • Enfants (0-10 ans) et adolescents (11-17 ans) : au moins 60 minutes par jour d’activité physique d’intensité modérée à élevée ;
  • Personnes âgées (65 ans et plus) : 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité modérée ou au moins 75 minutes d’activité d’endurance d’intensité soutenue au cours de la semaine, ou une combinaison équivalente d’activité d’intensité modérée et soutenue (2).

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), effectuer l’équivalent de 10 000 pas quotidiens est le minimum d’activité requise pour se maintenir en forme, préserver sa santé et maîtriser son poids.


Principaux déterminants des mobilités actives et de la pratique d’une activité physique

La connaissance des facteurs conditionnant les mobilités actives ou la pratique d’une activité physique est importante pour identifier les cibles d’interventions potentielles visant à augmenter l’activité physique mais également réduire la sédentarité. Parmi les facteurs identifiés, il y a ceux liés à l’environnement à travers l’aménagement du paysage urbain et des espaces verts et ceux liés à l’accessibilité et la qualité des équipements sportifs.

Des espaces verts de qualité et des équipements variés et gratuits : des facteurs déterminants dans les mobilités actives

La présence d’espaces verts et d’une multiplicité et variété d’équipements à une distance raisonnable du lieu de résidence constitue le principal facteur déterminant les mobilités actives. Les équipementsgratuits, fréquentés, perçus par les habitants comme sûrs et pratiques, encouragent d’autant plus la pratique d’une activité physique.

Exemple : une étude européenne intégrant 8 pays dont la France (3) a montré que les personnes vivant dans des environnements verts étaient 3 fois plus nombreux à pratiquer une activité physique que les autres et avaient 40 % moins de risque d’être en surpoids ou obèses.

Les caractéristiques physiques et laqualité des infrastructures : des facteurs déterminants de la marche à pied et de la pratique du vélo au sein d’un quartier

Un quartier favorisant les déplacements à pied (1) :

  • Est à échelle humaine et propose une diversité d’activités et de destinations d’intérêt ;
  • Concentre les différentes destinations possibles sur de courtes distances ;
  • Offre une diversité d’itinéraires pour les piétons ;
  • Ne comprend pas d’obstacles majeurs sur le trajet et de coupures urbaines ;
  • Dispose d’infrastructures pour les piétons de qualité et bien entretenus, assurant un confort et une sécurité pour les piétons (réels et perçus) ;
  • Est esthétique et agréable à parcourir.

Exemple : les personnes habitant dans des quartiers propices à la marche se déplacent 4 fois plus souvent à pied que celles habitant dans des quartiers où les voitures sont omniprésentes.

Un environnement favorable à la pratique du vélo (4) :

  • A un potentiel piétonnier élevé et dispose d’équipements et commerces de proximité ;
  • Permet d’assurer la sécurité (réelle et perçue) et le confort des cyclistes ;
  • Dispose d’infrastructures dédiées à la pratique du vélo (pistes cyclables, bandes cyclables, stationnements et supports à vélos) ;
  • Bénéficie de mesures d’apaisement de la circulation.

Impacts sanitaires des mobilités actives et de la pratique d’une activité physique

Les bénéfices pour la santé de toute forme de déplacement ou de la pratique d’une activité physique sont aujourd’hui bien documentés et ses effets démontrés quels que soient l’âge et le sexe.

  • Toute activité physique, même modérée, est préférable à l’inactivité, même si les bénéfices varient selon l’intensité, la durée et la fréquence de l’activité physique pratiquée (5) ;
  • La pratique d’une activité physique a de multiples impacts positifs sur la santé (6) : • Réduction de la mortalité et de la mortalité prématurée (survenant avant 65 ans) ;
    • Diminution du risque de développer certaines pathologies (cancers, maladies cardio-vasculaires, hypertension artérielle, diabète, démence, ostéoporose…) ;
    • Réduction du risque de dépression et d’anxiété ;
    • Meilleurs état de santé objectif et perçu et qualité de vie chez les personnes âgées ;
    • Bénéfices sur le plan social (lutte contre l’isolement et le sentiment de solitude) ;
    • Les bénéfices liés à la pratique du vélo sont supérieurs aux risques potentiels pour la santé liés aux traumatismes (7).

Zoom sur les populations vulnérables

Les enfants et adolescents

  • Les enfants sont de moins en moins actifs et passent de moins en moins de temps à l’extérieur, alors même qu’il s’agit d’un déterminant important de l’activité physique des enfants (8) ;
  • Les parents perçoivent des dangers pour leurs enfants (accidents de la route, trafic de stupéfiants, personnes malveillantes/marginaux). La perception d’un danger pour son enfant va amener les parents à restreindre ou supprimer les sorties et activités des enfants en dehors du domicile, notamment des enfants assez jeunes et des adolescentes (9,10) ;
  • Dans la grande majorité des déplacements entre le domicile et l’école, les enfants sont accompagnés par un adulte, le plus souvent un parent ;
  • Pour se rendre à l’école, de plus en plus d’enfants sont accompagnés en voiture et de moins en moins se déplacent à pied ou en vélo (11,12) ;
  • Une distance réduite entre le domicile et l’école est un des principaux facteurs prédictifs du fait d’aller à l’école à pied ou en vélo plutôt qu’en voiture (12,13).
  • Cependant, d’autres éléments rentrent en ligne de compte, comme la sécurité des déplacements, objective et perçue : la présence d’aménagements sécurisant les déplacements piétons (passages piétons sécurisés, sentiers piétons, présence de personnes facilitant les traversées de voies dangereuses…) favoriserait les trajets domicileécole à pied. A l’inverse, la présence d’une circulation automobile dense et d’une vitesse élevée de circulation aux alentours de l’école constituent des freins importants à la mobilité active des enfants (12,14).

Un environnement favorisant la pratique d’une activité physique et les jeux en extérieur chez les enfants :

  • Permet les déplacements sécurisés des enfants (présence de voies piétonnes et de pistes cyclables, de feux et passages piétons…) ;
  • Comprend des parcs et espaces verts de qualité ;
  • A une circulation automobile apaisée (volume et vitesse de circulation réduits) ;
  • Est perçu comme sûr par les habitants ;
  • Est vivant et marqué par la solidarité entre les habitants ;
  • Comprend des infrastructures de sports et loisirs adaptés à chaque âge (12,14,15) ;
  • La présence de sentiers pédestres, de parcours sportifs, d’infrastructures de loisirs ou de sport adaptés à leur âge (grands toboggans et balançoires, murs d’escalade ou terrain de basket) est associée à une augmentation de la fréquentation des espaces publics extérieurs et de la pratique d’une activité physique chez les adolescents (16).

Les personnes âgées

  • La marche constitue la principale activité physique chez les personnes âgées (17) ;
  • Avec l’avancée en âge et avec l’arrivée de limitations dans l’autonomie, les déplacements à pied sont plus difficiles et moins nombreux et les distances et temps de trajets réduits ;
  • Chaque année, environ 30 % des personnes âgées font l’expérience de chutes, dont plus de la moitié ont lieu en dehors du domicile. La peur de tomber ou d’être bousculé peut amener les personnes âgées à limiter le nombre et la durée de leurs déplacements (18) ;
  • La facilité d’accès aux équipements constitue le principal facteur déterminant la marche chez les personnes âgées. L’accessibilité de certains équipements revêt une importance particulière chez ce public, comme les commerces (les courses constituent la 1e raison de sortie chez les personnes âgées) et les transports publics (possibilité de se déplacer pour les personnes qui ne peuvent plus ou ont peur de conduire).

Un environnement favorisant la marche pour les personnes âgées (19–21) dispose :

  • De commerces de proximité, d’espaces verts et de sentiers piétons ;
  • De mobilier urbain permettant de s’arrêter et de se reposer (bancs) et de certains équipements, comme les toilettes et fontaines à eaux ;
  • De certains aménagements (trottoirs continus, dispositifs facilitant et raccourcissant les traversées de rues) ;
  • Est perçu comme sûr, est bien éclairé et ne comprend pas d’obstacles majeurs.

Un environnement peu propice à la marche pour les personnes âgées (17) présente :

  • Des revêtements de sols irréguliers (pavés, briques…), rendus glissants par les intempéries (allées carrelées, en pierre), en mauvais état/mal entretenus (sols craquelés, trous…) ;
  • Des trottoirs encombrés (poteaux, rochers décoratifs…) ;
  • Des escaliers, marches ou trottoirs hauts ;
  • Des rampes à forte pente ou en métal ;
  • Des rues mal éclairées ;
  • Des espaces partagés avec les cyclistes, skate etc. (peur de collision).

Les personnes à mobilité réduite

  • Les personnes à mobilité réduite (PMR) sont des personnes qui rencontrent des difficultés dans leurs déplacements, qu’elles soient temporaires ou permanentes ; cette notion renvoie à des situations et difficultés différentes : personnes avec des incapacités sensorielles ou intellectuelles, personnes en fauteuil roulant, personnes de petite taille, personnes âgées, femmes enceintes… ;
  • Les difficultés de déplacement rencontrées par les PMR sont de différents ordres (22) :
    • Pour les personnes en fauteuil roulant : les déplacements sur les sols meubles, glissants ou inégaux, le franchissement d’obstacles, de dénivelés (marches, pentes) et de passages étroits, l’utilisation d’objets ou équipements… ;
    • Pour les personnes déficientes visuelles : le déchiffrage de la signalisation, le repérage dans l’espace, l’orientation, la mauvaise ou non perception des contrastes, couleurs ou reliefs… ;
    • Pour les personnes ayant des difficultés motrices : les déplacements sur les sols peu praticables ou encombrés d’obstacles, les déplacements rapides ou sur de longues distances sans pouvoir se reposer, le franchissement sans appui des marches, dénivelés ou passages étroits, la station debout longue… ;
    • Pour les personnes ayant des difficultés auditives : l’identification des signaux sonores, l’interprétation des bruits significatifs de l’environnement.

Proposition de préconisations pour favoriser lesmobilités actives et la pratique d’une activité physique

Augmenter le potentiel piétonnier et cycliste du quartier et promouvoir les déplacements piétons et cyclistes

Mesures pour les piétons (19,21,23)

  • Aménagement de trottoirs continus d’une largeur minimale de 1,80 m ; privilégier si possible une largeur de 2,20 mètres, permettant un croisement confortable et sûr entre deux piétons, y compris ceux se déplaçant en fauteuil roulant ou avec une poussette ;
  • Liaison de toutes les destinations utilitaires (commerces, services, parcs, services de transport en commun, écoles, centre social) aux secteurs résidentiels par des trottoirs continus ;
  • Pour assurer une accessibilité universelle des trottoirs, les descentes de trottoir (bateaux pavés) doivent être
  • munies de tuiles podotactiles signifiant la présence d’une intersection ou d’une traverse piétonnière ;
  • Séparation physique du trafic à l’aide de barrière physiques efficaces (espaces verts infranchissables, marches, talus, fossés, mobilier...) ;
  • Dispositifs facilitant et raccourcissant les traversées de rue (saillies de trottoirs par exemple) ;
  • Présence d’un éclairage suffisant, de mobilier urbain le long des voies, sans créer d’obstacles pour les piétons :
    • Prévoir du mobilier de repos à intervalles réguliers, avec une ergonomie adaptée aux séniors (hauteur d’assise plus élevée, faible inclinaison des assises, dossier peu incliné vers l’arrière, accoudoirs délimitant chaque place, barre de repos et d’appui aidant à s’assoir et se mettre debout) et aux personnes avec un handicap ;
    • Disposition de poubelles anti-rats, limitant la prolifération des nuisibles ;
    • Installation d’éclairages permettant de voir à 20 mètres, sans engendrer de nuisances pour les riverains ;
    • Choix de mobilier résistant au vieillissement et au vandalisme.
  • Mise en place d’une signalétique piétonne exprimant les temps de trajets moyens à pied, comprenant une carte de localisation sur laquelle se retrouve, en plus des noms de rues, l’emplacement des voies cyclables, des circuits de transport en commun, des commerces, des toilettes publiques ainsi que des parcs ;
  • Promotion des trajets domicile-école à pied, par la mise en place de pédibus2.
  • Sécurisation des abords des équipements structurants du quartier ;
  • Aménagements pour que les deux-roues ne puissent pas emprunter les chemins piétons et accéder au parc.

Déplacements cyclistes (4, 24)

  • Séparation physique du trafic motorisé : privilégier si possible l’aménagement de pistes cyclables unidirectionnelles, d’une largeur minimale d’1 m50, ou de voies vertes ;
  • Sur une rue dotée de stationnements, la bande cyclable doit être placée de préférence entre la voie de circulation automobile et les espaces de stationnement afin d’accroitre la visibilité des cyclistes, ou bien entre le stationnement et le trottoir, à la condition qu’il y ait un dégagement minimal de 20m en amont de chaque intersection ;
  • Mise en place d’infrastructures aux intersections (traverses colorées avec marquages et chevrons, giratoires avec pistes cyclables sans priorité aux usagers du vélo) ;
  • Signalétique le long des parcours cyclables indiquant le temps de parcours en minutes et la direction des principaux lieux utilitaires ;
  • Mise à disposition de vélos en libre-service, de supports à vélos, de stationnements sécurisés.

Aménager les espaces verts et espaces publics

  • Diversification des fonctions et ambiances ;
  • Aménagement de sentiers pédestres / parcours piétonniers incitant à la marche ;
  • Equipements ludiques et sportifs pour favoriser la pratique d’une activité physique à tous les âges :
    • Adultes : terrains de pétanque, modules d’exercices extérieurs, parcours de santé ;
    • Enfants : aires de jeux adaptées à différentes classes d’âge et sécurisées (présence de rampes et gardecorps,
    • hauteur inférieure à 1,50 mètre, revêtements souples...) ;
    • Personnes âgées : parcours de marche (exemple 4S Nice)3.
  • Prévoir des fontaines à boire et toilettes à proximité des aires de jeux et infrastructures sportives ;
  • Proposer des activités collectives favorables à la santé (fitness, étirements, marche…).